Robert Courrier, pionnier de l’endocrinologie de la reproduction

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À l’occasion du centenaire de sa thèse de Médecine sur
« La phase folliculaire du cycle sexuel chez la femelle des mammifères ». 

Robert Courrier est né le 6 octobre 1895 à Saxon-sion (Meurthe-et-Moselle) dans une famille d’instituteurs. Il mourra le 14 mars 1986 à Paris.

Jeunesse et formation

Il prépare en 1913 à la Faculté des sciences de Nancy le PCN (l’année pré-médicale de l’époque) pour entrer à la Faculté de Médecine de Strasbourg. Ses études sont malheureusement interrompues par la guerre de 1914-18 : mobilisé, il est blessé à la bataille de Verdun et reçoit la croix de guerre en 1916.

Après la guerre, il poursuit ses études à la Faculté de médecine de Strasbourg. En 1920, il est employé comme préparateur d’histologie dans le laboratoire de Pol Bouin. Il se passionne pour la recherche. Il  publie deux notes sur les chauves-souris hibernantes, mâles et femelles ; dès 1921, il tente de vérifier l’action de la thyroïde sur le thymus. Ainsi sont esquissées les trois directions majeures de ses recherches : l’endoctrinologie du testicule, de l’ovaire et de la thyroïde.

La folliculine, première hormone ovarienne

En 1923, ses recherches sur l’histo-physiologie génitale femelle aboutissent en 1924 à sa thèse de doctorat en médecine sur la phase folliculaire du cycle sexuel. Robert Courrier étudiait les manifestations vaginales du rut, ou oestrus, chez la femelle de cobaye. En 1924, il rapporte que l’injection de liquide folliculaire de truie à des femelles cobaye castrées produit un rut expérimental. C’était la découverte de l’hormone qu’il appela folliculine, car produite dans le liquide folliculaire de l’ovaire. Courrier montrait de plus que la folliculine injectée à la femelle pleine traverse le placenta et reproduit la crise génitale du nouveau-né (un phénomène hormonal pouvant générer un gonflement transitoire des organes sexuels et des seins). Il constatait que le liquide amniotique est riche en folliculine. Ces découvertes concernant la première hormone ovarienne étaient réunies dans sa thèse de Doctorat en Médecine.

La folliculine fut découverte simultanément par les Américains Allen et Doisy qui l’appelèrent Oestrine. C’est ce terme basé sur l’action de l’hormone sur sa cible, et non son origine, qui a finalement été adopté pour l’oestradiol et les œstrogènes ovariens. Pour l’hormone mâle c’est la testostérone, sécrétée par les testicules, qui l’a emporté.

Entre 1925 et 1928, Courrier proposa ensuite la thèse selon laquelle l’ovaire sécrète une deuxième hormone lors de la phase lutéinique, la progestérone, isolée en 1930 par Allen et Corner.

L’endocrinologie du testicule

Bien que ses recherches initiales sur la physiologie ovarienne lui valurent probablement le plus grand renom, Courrier se consacre ensuite à la fonction endocrine du testicule, peut- être par fidélité envers son maitre Pol Bouin et sa théorie de l’interstitiel.

En 1926, Rober Courrier est chargé de l’enseignement d’histologie à la Faculté de médecine d’Alger. Son doctorat en sciences naturelles sur le « Déterminisme des caractères sexuels secondaires chez quelques mammifères à activité testiculaire périodique » montrait une coïncidence entre l’épanouissement des caractères sexuels mâles et l’activité sécrétrice de la glande interstitielle, alors que la lignée reproductrice source des spermatozoïdes est inactive. Ultérieurement, comme Professeur agrégé d’histologie et embryologie, Courrier provoquait le développement des caractères sexuels masculins en stimulant la seule glande interstitielle du testicule du Magot d’Algérie impubère. Ces observations confortaient la notion que l’hormone mâle est sécrétée par les cellules interstitielles du testicule.

Distinctions

Robert Courrier s’est ensuite dévoué en acceptant de nombreuses charges pour faciliter le développement de l’endocrinologie et la promotion de ses élèves et collègues.

Membre de l’Académie des Sciences, il assume la charge de secrétaire perpétuel de 1948 à 1986. À partir de 1931, comme professeur au Collège de France, il est responsable de la chaire de morphologie expérimentale et endocrinologie ; il obtient la médaille d’or du CNRS en 1964.

Notons que l’endocrinologie sexuelle française a démarré en Alsace avec l’histologie (Bouin, Courrier) puis la physiologie (Jost), puis est devenu plus moléculaire avec la chimie et la biologie moléculaire des récepteurs hormonaux (Chambon).

Conclusion 

Au total cette figure montre que la contribution originale de Courrier dans sa thèse de Médecine a été de découvrir que les ovaires de mammifère produisaient également une activité hormonale responsable de l’oestrus qu’il a appelé folliculine et qui correspond à un mélange de plusieurs oestrogènes (oestradiol surtout, oestrone, oestriol) :

Il a ensuite développé l’idée de Paul Bouin que les testicules produisaient aussi par les cellules interstitielles (cellules de Leydig) une activité hormonale, la testostérone :

Ainsi les deux gonades produisent dans les deux sexes des hormones qui in fine favorisent la rencontre de l’ovule et du spermatozoide  pour assurer la fécondation et la formation de l’embryon. 

À lire :

Il est difficile d’accéder aux ouvrages de cette période. Le livre de Robert Courrier sur l’« Endocrinologie de la gestation » (1945) est épuisé. En revanche, comme cette thématique a beaucoup évolué, il existe de nombreux livresexposantles bases générales.

Sur les hormonesÉtienne-Émile BAULIEU, Hormones, Herman, 1978

Sur la reproduction féminine et sa pathologiePierre MAUVAIS-JARVIS, Médecine de la reproduction-Gynécologie endocrinienne, Flammarion Médecine/Science, 2e édition, 1986

Émile PAPIERNIK et al., Gynécologie, Flammarion Médecine/Science, 1994

Crédits images :

Bannière de la page d’accueil : Ovaire de lapin. Photo prise en afocal derrière un microscope par Thomas Bresson © WikimédiaCommons

Illustration du chapô : Portrait de Robert Courrier © Archives de l’académie des sciences

Bannière de l’article : Robert courrier dans son laboratoire © Archives de l’Académie des sciences

Corps du texte : Fonction des ovaires et des testicules © Henri Rochefort et Vincent Cavailles 

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